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Loi Zucman : comprendre l'impôt plancher sur le patrimoine des ultra-riches

📅26 septembre 2025

La "loi Zucman", du nom de l'économiste Gabriel Zucman, désigne une proposition d'impôt plancher sur le patrimoine des plus grandes fortunes françaises. Adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale en février 2025 puis rejetée par le Sénat en juin, cette mesure fait l'objet d'un débat intense sur la justice fiscale et l'efficacité économique.

Le principe de base

Qu'est-ce que la taxe Zucman ?

La taxe Zucman propose un impôt différentiel de 2% minimum sur le patrimoine net des contribuables possédant plus de 100 millions d'euros.

Concrètement :

  • Elle concerne environ 1 800 foyers fiscaux en France (soit ~0,005% des contribuables)
  • Il ne s'agit pas d'une taxe supplémentaire, mais d'un impôt plancher
  • Si un contribuable paie déjà 2% ou plus de son patrimoine en impôts, il n'est pas concerné
  • Seuls ceux qui paient moins complètent la différence

L'inspiration : les travaux de Gabriel Zucman

Gabriel Zucman, économiste français de 38 ans et professeur à l'École normale supérieure, a démontré que les ultra-riches français ne paient que 27% de prélèvements en proportion de leurs revenus, contre 50% pour le reste de la population.

Rapporté à leur patrimoine total, cela ne représente que 0,2% de leur richesse, bien moins que les classes moyennes.

Les enjeux de la mesure

Objectif de justice fiscale

La taxe vise à corriger ce que ses promoteurs appellent la "régressivité du système fiscal" au sommet de l'échelle des revenus. Les grandes fortunes bénéficient en effet de nombreux mécanismes d'optimisation fiscale qui réduisent considérablement leur taux d'imposition effectif.

Enjeu budgétaire

Les estimations des recettes potentielles varient considérablement :

  • Partisans au projet : entre 15 et 25 milliards d'euros par an
  • Opposants au projet : environ 5 milliards d'euros par an
  • Économistes modérés : 5 milliards d'euros après prise en compte des réactions comportementales

Les limites et controverses

Défis de mise en œuvre

Évaluation du patrimoine : Déterminer la valeur exacte d'un patrimoine de 100 millions d'euros pose des défis techniques considérables, notamment pour les actifs non cotés ou les œuvres d'art.

Optimisation fiscale : Les contribuables concernés disposent des moyens de recourir à des montages complexes pour réduire leur assiette taxable.

Risques économiques identifiés

Exil fiscal : Les études empiriques suggèrent que pour 1 euro prélevé mécaniquement, seuls 0,25 euro se traduisent effectivement en recettes à long terme, le reste étant perdu par l'exil fiscal et l'optimisation.

Attractivité du territoire : Les opposants craignent une diminution de l'attractivité française pour les investisseurs et entrepreneurs fortunés.

Obstacles juridiques

La jurisprudence constitutionnelle française limite les possibilités de taxation du patrimoine. Les précédents, notamment l'échec de l'ISF, questionnent la faisabilité juridique d'une telle mesure.

État actuel et perspectives

Situation politique

  • Adoptée par l'Assemblée nationale (février 2025)
  • Rejetée par le Sénat (juin 2025)
  • 🔄 En débat dans le cadre des discussions budgétaires

La chute du gouvernement Bayrou, opposé à cette mesure, pourrait relancer le débat.

Comparaisons internationales

Plusieurs pays ont expérimenté des taxes sur la fortune avec des résultats mitigés. La France elle-même a supprimé l'ISF en 2017, invoquant son inefficacité et ses effets contre-productifs.

Un cas pratique pour mieux comprendre

Exemple concret : Madame X, dirigeante d'une PME familiale, avec un patrimoine de 120 millions d'euros.

Sa fiscalité actuelle :

  • Dividendes perçus : 2 millions d'euros/an
  • Impôts payés : PFU (prélèvement forfaitaire unique) de 30% = 600 000 euros/an
  • Taux effectif sur le patrimoine : 600 000 ÷ 120 000 000 = 0,5%

Avec la taxe Zucman :

Elle devrait payer au minimum 2% de 120 millions = 2,4 millions d'euros/an.

Elle devrait donc compléter : 2,4 M - 0,6 M = 1,8 million d'euros supplémentaires.

Comment payer ces 1,8 millions ?

  • Liquidités disponibles : si elle a cette somme sur ses comptes
  • Vente d'actifs financiers : actions, obligations, placements divers
  • Vente de parts d'entreprise : mais risque de perte de contrôle
  • Emprunt bancaire : avec ses actifs en garantie

Problème potentiel : Si son patrimoine est principalement constitué de parts dans son entreprise familiale (cas fréquent), elle pourrait être contrainte de vendre des parts pour payer l'impôt. Cela pourrait diluer son contrôle de l'entreprise ou même la forcer à chercher des investisseurs externes.

Cas où elle ne serait pas concernée :

Si elle percevait 8 millions de dividendes/an, ses impôts s'élèveraient à 2,4 millions (soit exactement 2% de son patrimoine). Aucun impôt supplémentaire ne serait dû.

Ce que cela signifie pour vous

Pour les particuliers avec un patrimoine inférieur à 100 millions d'euros : cette taxe ne vous concerne pas directement. Cependant, ses effets indirects pourraient vous toucher selon l'efficacité de la mesure : amélioration des services publics si elle génère des recettes, ou au contraire risques de délocalisation d'entreprises et de diminution de l'attractivité française.

Pour ceux qui ont un patrimoine supérieur à 100 millions d'euros : vous êtes directement concernés par cette taxe. Il convient d'évaluer précisément votre taux d'imposition effectif actuel et d'anticiper les stratégies patrimoniales possibles : restructuration des actifs, optimisation de la rémunération, ou analyse des implications d'une éventuelle mobilité fiscale. L'accompagnement d'un conseiller spécialisé devient essentiel pour naviguer dans ce nouveau cadre fiscal.

Pour les conseillers en gestion de patrimoine : cette mesure transforme les enjeux du conseil patrimonial. Vos clients fortunés rechercheront des stratégies d'optimisation plus sophistiquées et vous devrez maîtriser les implications de cette nouvelle fiscalité. C'est une opportunité de démontrer votre expertise sur un sujet complexe et d'actualité.

Conclusion

La loi Zucman cristallise les tensions entre justice fiscale et efficacité économique. Si elle répond à une aspiration d'équité face aux inégalités croissantes, sa mise en œuvre soulève des défis techniques, juridiques et économiques majeurs.

Le débat illustre la difficulté à concilier impératifs de justice sociale et contraintes économiques dans un monde globalisé où les capitaux sont mobiles.

L'enjeu dépasse la seule question fiscale : il s'agit de définir le modèle de société et le niveau acceptable d'inégalités dans une démocratie moderne.

Sources

  1. Article Wikipédia - Taxe Zucman
  2. MoneyVox - Qu'est-ce que la taxe Zucman
  3. La Finance pour Tous - La taxe Zucman au cœur du débat économique
  4. Vert.eco - Taxe Zucman sur les ultra-riches
  5. Hexa Patrimoine - Taxe Zucman : un impôt plancher
  6. Le Monde - La taxe Zucman générerait une réduction du déficit
  7. Les Echos - Taxe Zucman : l'obstacle constitutionnel
  8. Alternatives Economiques - Tout comprendre à la taxe Zucman

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