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Impôt sur la fortune improductive : ce qui change avec la fin de l'IFI

📅05 novembre 2025
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Ceci n'est pas un conseil en investissement. Les informations présentées sont à titre informatif uniquement. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.

Un tournant majeur voté le 31 octobre 2025

Dans la nuit du 31 octobre 2025, l'Assemblée nationale a franchi une étape historique en adoptant la transformation de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en impôt sur la fortune improductive. Avec 163 voix pour et 150 contre, cet amendement porté par le député Jean-Paul Matteï (Les Démocrates) et sous-amendé par Philippe Brun (PS) marque une extension importante de la base d'imposition des patrimoines français.

Cette mesure, soutenue par une coalition inédite réunissant le Rassemblement national, le Parti socialiste, le MoDem et le groupe centriste Liot, vise à taxer les actifs considérés comme « improductifs » pour l'économie. Face à elle, Renaissance et la droite se sont opposés, craignant un effet négatif sur l'attractivité du territoire. La France insoumise, quant à elle, a voté contre en raison de l'exonération accordée à la résidence principale, qu'elle juge trop favorable aux plus aisés.

De l'IFI à l'impôt sur la fortune improductive : ce qui change vraiment

Le nouvel impôt conserve le seuil de déclenchement de 1,3 million d'euros de patrimoine net taxable, mais opère deux modifications majeures dans son fonctionnement.

Premièrement, le barème évolue radicalement. Alors que l'IFI appliquait un taux progressif allant de 0,5% à 1,5% selon la valeur du patrimoine, l'impôt sur la fortune improductive instaure un taux unique de 1% sur l'ensemble du patrimoine dépassant le seuil. Cette simplification du calcul rend la fiscalité plus lisible, mais peut aussi impacter différemment les contribuables selon leur niveau de patrimoine.

Deuxièmement, et c'est là le changement le plus significatif, l'assiette fiscale s'élargit considérablement. Là où l'IFI ne visait que les biens immobiliers, le nouvel impôt englobe désormais une palette bien plus large d'actifs jugés improductifs pour l'économie réelle.

Les nouveaux actifs dans le viseur du fisc

Au-delà des biens immobiliers déjà taxés avec l'IFI, voici les nouveaux actifs qui entreront dans le calcul de l'impôt sur la fortune improductive :

CatégorieExemples d'actifs concernés
Biens meubles corporelsObjets précieux, voitures de collection, yachts, avions privés, meubles de valeur
Actifs numériquesCryptomonnaies (Bitcoin, Ethereum, etc.)
Œuvres et objets d'artTableaux, sculptures, antiquités
Métaux précieuxOr physique, lingots, pièces de collection
Liquidités et placementsComptes courants, livrets non productifs, placements financiers non investis dans l'économie productive
Assurance-vieFonds en euros non alloués à l'investissement productif

Les actifs professionnels restent exclus du calcul, préservant ainsi les outils de travail et les participations actives dans les entreprises. L'évaluation de ces actifs se fera à leur valeur de marché au 1er janvier de l'année d'imposition.

Résidence principale : une exonération revue à la hausse

L'un des sous-amendements adoptés concerne le traitement de la résidence principale, avec une évolution notable par rapport à l'IFI. Désormais, la résidence principale bénéficie d'une exonération totale jusqu'à 1 million d'euros de valeur.

Concrètement, si votre habitation principale est évaluée à 1,2 million d'euros, seuls 200 000 euros entreront dans le calcul de votre patrimoine taxable. Cette mesure remplace l'ancien abattement de 30% appliqué dans le cadre de l'IFI, qui était moins généreux pour les logements de valeur modérée mais plus avantageux pour les biens de très forte valorisation.

Attention toutefois : seule la résidence principale ou unique est concernée par cette exonération. Les résidences secondaires restent pleinement taxables. Le traitement des biens immobiliers loués fait encore débat : la version adoptée par l'Assemblée semble les inclure dans la base taxable, contrairement à la version du Sénat qui prévoit des exemptions pour certains logements locatifs. Le texte final dépendra des arbitrages lors du passage au Sénat.

Qui sera concerné par ce nouvel impôt ?

L'impôt sur la fortune improductive ciblera principalement les ménages dépassant ce seuil de déclenchement, déduction faite des dettes. En 2024, l'IFI concernait environ 186 000 foyers fiscaux et générait 2,2 milliards d'euros de recettes.

Avec l'élargissement de l'assiette, le nombre de contribuables assujettis pourrait légèrement augmenter, notamment parmi les détenteurs de cryptomonnaies, d'œuvres d'art ou de biens de collection de valeur. Les estimations de recettes restent incertaines. La ministre Amélie de Montchalin a déclaré qu'il était impossible de se prononcer précisément, évoquant une fourchette entre 1 et 3 milliards d'euros. Le Parti socialiste revendique jusqu'à 2 milliards d'euros de recettes supplémentaires par rapport aux 2,2 milliards actuels de l'IFI, ce qui suggère un élargissement significatif de la base taxable.

Plusieurs profils seront particulièrement impactés : les collectionneurs d'art, les investisseurs en cryptomonnaies disposant de portefeuilles conséquents, les propriétaires de résidences secondaires de prestige, ou encore les détenteurs de liquidités importantes sur des comptes non productifs.

Un parcours parlementaire encore incertain

Si l'adoption en première lecture à l'Assemblée nationale constitue une étape importante, le chemin vers l'application effective de cet impôt reste semé d'incertitudes. Le texte doit maintenant franchir l'obstacle du Sénat, où les équilibres politiques diffèrent sensiblement de ceux de l'Assemblée.

Le calendrier prévoit l'examen de la partie « recettes » du projet de loi de finances par le Sénat entre le 24 novembre et le 10 décembre 2025. En cas de désaccord entre les deux chambres, une commission mixte paritaire pourrait être convoquée pour tenter de trouver un compromis. L'adoption définitive du budget 2026, et donc de cet impôt, n'est donc pas garantie à ce stade.

Plusieurs sénateurs ont déjà exprimé leurs réticences, craignant un effet négatif sur l'attractivité fiscale de la France et une potentielle fuite des capitaux vers des pays plus cléments. D'autres voix, au contraire, saluent une mesure de justice fiscale visant à taxer des patrimoines jusqu'ici partiellement hors du radar fiscal.

Que faire en attendant ?

Face à cette évolution législative incertaine mais potentiellement impactante, plusieurs réflexes patrimoniaux méritent d'être adoptés dès maintenant.

Commencez par évaluer votre patrimoine global en incluant tous les actifs qui pourraient entrer dans le champ de ce nouvel impôt. Au-delà de vos biens immobiliers, listez vos œuvres d'art, vos véhicules de collection, vos cryptomonnaies, votre or physique et vos placements financiers. Cette photographie vous permettra de déterminer si vous seriez concerné par ce seuil d'imposition.

Si vous approchez ou dépassez ce seuil, il peut être judicieux d'anticiper en réorientant votre patrimoine vers des actifs productifs, qui resteront exclus de la base taxable. Les investissements dans l'économie réelle, comme les parts de sociétés opérationnelles ou les placements en private equity, conservent leur attractivité fiscale.

Enfin, surveillez attentivement l'évolution du texte lors de son passage au Sénat. Selon les modifications qui pourraient être apportées, vos choix d'optimisation fiscale pourraient nécessiter des ajustements. Consulter un conseiller en gestion de patrimoine devient particulièrement pertinent dans ce contexte d'incertitude législative, afin d'adapter votre stratégie patrimoniale aux évolutions fiscales en cours.


Sources :

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